Soulevez le couvercle d’une cocotte en fonte : un panache de vapeur parfumée au romarin s’élève, diffusant des effluves de tomate et d’oignon caramélisé. Ce fumet révèle la profondeur d’un agneau longuement braisé. Ce qui commence comme un réconfort pour une soirée glaciale se transforme soudain en moment de convivialité dès que l’arôme emplit la pièce. Tout ce qu’il réclame, c’est de la patience et, si le cœur vous en dit, un simple trait de vin rouge. En retour, il offre une histoire culinaire capable de magnifier un humble jarret.
Origines
On raconte, sans certitude historique, que dans l’arrière-pays provençal, les bergers réservaient la partie osseuse inférieure du jarret aux jours où l’on devait conjuguer économie et temps. Un feu doux, un pot en terre cuite et, peut-être, un trait de vin rouge de table métamorphosaient ce morceau en plat dominical, prêt juste au moment où la paroisse rentrait de la messe.
Selon la même anecdote, des marchands italiens de la Riviera auraient orienté le ragoût vers leur propre soffritto (oignon, carotte, céleri) et initié les Provençaux au plaisir de napper la sauce sur des pâtes striées qui retenaient chaque goutte. Parfois, on le versait simplement sur des gnocchi ou même un risotto crémeux. Quelles que soient les racines exactes, ce ragoût demeure aujourd’hui un rituel de l’automne à l’hiver, calé sur des agneaux ayant brouté depuis le printemps, dont la chair s’est imprégnée des herbes de garrigue.
Anatomie de la saveur et de la technique
Ingrédients clés
La vedette est un jarret d’agneau avec os, riche en collagène ; durant la cuisson, les tendons se délient pour offrir une texture soyeuse. Une minutieuse brunoise du trio soffritto est essentielle : ces cubes minuscules libèrent rapidement leur douceur et brunissent juste assez pour suggérer le caramel. Q
uatre cent cinquante grammes de passata de tomates apportent une acidité douce, tandis qu’un discret cube de bouillon de bœuf glisse une couche supplémentaire d’umami que grand-mère ne mentionnerait jamais. Si vous choisissez d’utiliser du vin, versez environ 120 ml d’un rouge de table (par exemple un Côtes-du-Rhône) pour sa charpente tannique et sa chaleur légèrement fruitée. Enfin, une unique branche de romarin frais coiffe la cocotte de notes vives et résineuses.
Cuisson lente
Tout commence par la réaction de Maillard : jarret et légumes sont saisis jusqu’à ce que le fond de la cocotte se vernisse d’un dépôt acajou qui se dissoudra plus tard dans la sauce. Ensuite, le cuisinier choisit son rythme. En cocotte-minute, la pression réduit le temps de cuisson à moins d’une heure ; un travail expéditif, même si la plupart des arômes demeurent captifs jusqu’au sifflement final.
Une cuisson douce de plusieurs heures sur le feu parfume, quant à elle, la maison tout l’après-midi. Dans les deux cas, le collagène se transforme progressivement en gélatine, si bien que la viande finit par glisser de l’os au simple contact d’une cuillère. Beaucoup écument la graisse chatoyante à mesure qu’elle remonte. Ils attendent ensuite pour saler franchement, lorsque la sauce a réduit, que les saveurs se sont concentrées et que le liquide circule avec la densité d’un jus de viande.
Service, accords et débats contemporains
Les puristes aiment servir le jarret entier, os apparent, simplement escorté de sa fidèle branche de romarin et d’une sauce épaissie par évaporation. D’autres improvisent : ils l’accompagnent d’une polenta crémeuse, laissent des épices d’Afrique du Nord côtoyer le romarin ou dynamisent le ragoût d’une gremolata de dernière minute.
Dans le verre, visez un Rhône méridional poivré ou un Nero d’Avola gorgé de soleil : leurs tanins terreux font écho à la profondeur du plat. Le lendemain, effilochez les restes pour un ragù servi sur du levain grillé, et découvrez que la générosité du mets perdure. Où que l’agneau soit élevé, préférez-le issu d’un élevage en plein air : la saveur comme la tradition naissent au pâturage.

Ragoût de jarret d’agneau braisé
Ingrédients
- 1 jarret d’agneau avec l’os
- 1 oignon coupé en dés
- 1 carotte coupée en dés
- 1 branche de céleri coupée en dés
- 1 branche de romarin frais
- 1 cube de bouillon de bœuf brun
- 3 cuillères à soupe d’huile d’olive
- 450 g de sauce tomate maison
- 0.12 L de vin rouge facultatif
- 450 g de pâtes rigatoni
- 1 cuillère à soupe de sel pour les pâtes
Procédé
Préparation
- Retirez la partie supérieure charnue d’une cuisse d’agneau et conservez l’os ainsi que la partie inférieure pour le ragoût.1 jarret d’agneau
- Faites revenir l’oignon, la carotte et le céleri dans l’huile d’olive afin de réaliser un soffritto.1 oignon, 1 carotte, 1 branche de céleri, 3 cuillères à soupe d’huile d’olive
- Ajoutez la viande et faites-la dorer sur toutes les faces.
- Braisez la viande, puis ajoutez la branche de romarin et, si désiré, le vin rouge.1 branche de romarin frais, 0.12 L de vin rouge
- Incorporez la sauce tomate et le cube de bouillon de bœuf, mélangez puis fermez la cocotte-minute.450 g de sauce tomate, 1 cube de bouillon de bœuf
- Laissez cuire l’agneau à la cocotte-minute jusqu’à tendreté.
- Si vous utilisez une casserole classique, laissez mijoter à couvert jusqu’à ce que la viande soit fondante.
- Disposez le ragoût dans un plat de service et retirez la viande de l’os.
- Faites cuire les rigatoni dans une grande casserole d’eau bouillante salée.450 g de pâtes rigatoni, 1 cuillère à soupe de sel
- Mélangez un peu de sauce aux rigatoni dès qu’elles sont cuites pour bien les enrober.
- Servez le reste du ragoût à part afin que chacun puisse ajouter plus de viande et de sauce.
Notes
- Pour une saveur différente, remplacez le vin rouge par du Marsala.
- Le ragoût se réchauffe très bien et est souvent encore meilleur le lendemain.
- Servez également avec de la polenta ou du riz selon vos envies.