L’arôme des pommes de terre rôties au four, du fromage qui grésille et du beurre fondu s’élève d’un plat en fonte dans une cuisine napolitaine et remplit la pièce. Voici le Gattò di patate : un « gâteau » salé, riche en produits laitiers et relevé d’une touche fumée.
Sous sa croûte dorée, la technique française se mêle aux saveurs du Sud de l’Italie pour former un classique transmis depuis le XVIIIe siècle.
Quand la France rencontre la Campanie : récit des origines au XVIIIe siècle
Les origines du Gattò remontent au XVIIIe siècle. Les cuisiniers français de la cour royale des Bourbons introduisirent alors leur gâteau sophistiqué et savamment superposé à Naples, également berceau de la pastiera napolitaine.
Dans les salons huppés de l’aristocratie, le Gattò fut servi lors des mariages fastueux. Dressé en couches — tout comme la lasagna di Carnevale — il gagna ensuite les déjeuners dominicaux, devenant un plat convivial des familles napolitaines.
« Gâteau » devient « Gattò » : langue et mutations
La langue napolitaine a rapidement adapté le terme français : gâteau perd sa voyelle centrale et devient « gattò ». Dès le XIXe siècle, cette graphie apparaît dans les recueils culinaires locaux. Le même phénomène touche le ragout : en italien, il devient « ragù », ou « raù/’rraù » en dialecte. Ces évolutions montrent comment les emprunts français se fondent dans la musicalité napolitaine.
Anatomie des couches : pommes de terre, béchamel, fromage
Chaque bouchée de Gattò combine plusieurs textures. Des pommes de terre riches en amidon, pressées encore chaudes, forment une base dense et moelleuse.
On y incorpore immédiatement une béchamel onctueuse pour la souplesse. La provola ou la mozzarella apportent un long filé de fromage, tandis que de fines tranches de mortadelle ou de jambon peuvent s’y glisser, parfois avec des œufs durs selon la tradition familiale. Leur salinité relève la purée. Enfin, on couvre de chapelure, de beurre et de parmesan. La cuisson se poursuit jusqu’à obtenir une surface dorée et parfumée.
Astuces de cuisson tout-en-un
Comment obtenir la croûte dorée du Gattò ? Beurrez et chapelurez le fond et le dessus du moule, puis saupoudrez à nouveau de chapelure et de parmesan avant d’ajouter quelques noisettes de beurre.
Enfournez le plat dans un four préchauffé et faites cuire 20 à 30 minutes selon votre appareil, jusqu’à ce que la surface soit bien croustillante. Laissez reposer au moins dix minutes à la sortie du four. Ce temps fixe l’amidon des pommes de terre et permet de découper des parts nettes et crémeuses.
Marqueurs d’authenticité vs débats contemporains
Demandez à une nonna napolitaine : elle exigera des pommes de terre écrasées à la main, de la provola (souvent fumée) et une béchamel veloutée, sans ail. Aujourd’hui, certains optent pour une version végétarienne sans charcuterie ; d’autres remplacent la provola ou la mozzarella par de la scamorza fumée.
Le Gattò peut aussi accompagner un plat de trofie au pesto, ou se décliner sans gluten avec un roux à la farine de riz. Le point le plus discuté reste la présence de mortadelle : Naples et Caserte revendiquent chacune la variante « authentique », témoignant d’une rivalité amicale.
Service, accords et dernière bouchée
Préparez le Gattò dans un plat beurré et chapeluré, puis servez-le en parts généreuses, bien chaud mais non brûlant : l’intérieur doit rester fondant, la croûte fermement croustillante. Côté accords, on privilégie une Falanghina de Campanie, vin blanc vif qui équilibre la richesse du plat, ou un Aglianico rouge aux notes fumées.
Les restes deviennent souvent un « Gattò al salto » : cubes poêlés pour l’aperitivo, au cœur de purée fondante et de fromage filant. De la table de fête aux repas du quotidien, ce gâteau de pommes de terre incarne le réconfort familial, rehaussé du parfum de beurre et du craquant de la chapelure — un héritage italien à partager, bouchée après bouchée.
Authentique Gattò di patate
Ingrédients
Purée de pommes de terre
- 2 kg de pommes de terre moyennes Russet ou Yukon Gold
- 240 ml de lait
- 2 œufs frais
- 40 g de parmesan fraîchement râpé
- sel
- poivre noir
Béchamel
- 480 ml de lait
- 40 g de farine
- 60 g de beurre
- 2.5 g de sel
- 1 pincée de noix de muscade fraîchement râpée
Garniture
- 400 g de provola ou mozzarella
- 225 g de jambon ou mortadelle, optionnel
- 2 œufs durs, optionnel
Finition
- 30 g de beurre
- 60 g de chapelure
- 10 g de parmesan fraîchement râpé
Procédé
Préparation de la purée de pommes de terre
- Faites cuire les pommes de terre dans de l’eau salée.2 kg de pommes de terre moyennes, sel
- Égouttez les pommes de terre.
- Si vous utilisez un presse-purée, épluchez les pommes de terre tant qu’elles sont chaudes.
- Réduisez les pommes de terre en purée.
- Si vous utilisez un presse-légumes KitchenAid, vous pouvez passer les pommes de terre sans les éplucher.
Préparation de la béchamel
- Mélangez la farine et le beurre dans une casserole sur feu doux afin d’obtenir un roux blanc.40 g de farine, 60 g de beurre
- Ajoutez progressivement le lait chaud en remuant pour éviter les grumeaux.480 ml de lait
- Portez à ébullition en remuant constamment.
- Réduisez le feu et continuez à remuer jusqu’à obtenir la consistance souhaitée.
- Ajoutez le sel et la noix de muscade en fin de cuisson.2.5 g de sel, 1 pincée de noix de muscade
Préparation du mélange de pommes de terre
- Ajoutez à la purée la béchamel, les œufs et le parmesan râpé.2 œufs, 40 g de parmesan
- Mélangez jusqu’à obtenir une préparation homogène.
Assemblage et cuisson
- Beurrez le plat et recouvrez-le de chapelure.30 g de beurre, 60 g de chapelure
- Déposez une première couche de purée de pommes de terre.
- Ajoutez une couche de fromage mozzarella, de jambon et d’œufs durs tranchés.400 g de provola, 225 g de jambon, 2 œufs
- Recouvrez avec une deuxième couche de purée de pommes de terre.
- Parsemez le dessus de chapelure, saupoudrez de parmesan et répartissez quelques noisettes de beurre.10 g de parmesan
- Faites cuire dans un four chaud jusqu’à ce que le dessus soit doré et croustillant.
- Laissez reposer avant de servir.
